
Le bailleur obtient gain de cause pour sous-location irrégulière
Dans cette affaire, le bail ayant pris fin, le propriétaire d’un bien immobilier situé dans le quartier de la Cité à Paris réclame sa part aux locataires qui ont engendré pendant 3 ans plus de 28 000 euros de revenus pour avoir sous-loué leur logement alors que le bail précisait clairement que cette pratique est interdite.
Devant le juge du tribunal d’instance de Paris, le bailleur obtient gain de cause. Le juge du tribunal d’instance condamne les locataires à lui verser 5 000 euros de dommages-intérêts au titre de la sous-location irrégulière.
Les locataires interjettent appel de cette décision en fondant leur argumentation sur la théorie de l’enrichissement sans cause.
Au soutien de sa demande de remboursement, le conseil du propriétaire soulève devant la cour d’appel, le droit d’accession de l’article 546 du Code civil qui permet au propriétaire d’un bien immobilier d’en percevoir tous les fruits et l’article 547 du même Code précise qu’il peut notamment s’agir des fruits civils tels que les loyers.
La cour d’appel de Paris rejette les arguments soulevés par les locataires. En effet, les juges d’appel ont considéré, au contraire, que les loyers issus de sous-locations illicites sont des fruits civils produits par l’appartement et que, de ce fait, ils doivent nécessairement revenir au propriétaire.
Elle condamne les locataires à rembourser au propriétaire l’intégralité des sommes perçues grâce à la sous-location soit 28 000 euros (arrêt cour d’appel de Paris du 5 juin 2018 n° 16/10684).
La locataire condamnée à dédommager le propriétaire des sommes perçues illicitement
Dans une autre affaire, une locataire qui sous-louait son appartement du 18e arrondissement sans l’accord de sa propriétaire a été lourdement condamnée par le tribunal d’instance de Paris à rembourser 46 277 euros. Soit l’intégralité des sommes perçues de manière illégale entre 2011 et 2018 (TI de Paris, jugement du 24 octobre 2018 RG n° 11-18-211247).
La locataire, qui a signé son bail pour un meublé en 2007, avait bien sollicité sa propriétaire pour sous-louer le logement en 2016, mais n’a jamais reçu l’accord écrit ou verbal de cette dernière. C’est en se rendant sur le site d’Airbnb que le bailleur s’est aperçu que son appartement était en location sur la plateforme depuis plusieurs mois.
En plus du remboursement des sommes perçues par la location illégale, la locataire devra dédommager sa propriétaire à hauteur de 2 000 euros de dommages et intérêts. La sanction devra être exécutée immédiatement, même en cas d’appel. Le bailleur a également obtenu de la justice, la résiliation du bail de location et l’expulsion de sa locataire
Par ailleurs, le conseil du bailleur va également assigner en justice Airbnb en coresponsabilité pour ne pas avoir fait respecter la mise en location maximale de 120 jours par an et ne pas avoir supprimé l’annonce de la sous-location (art. L324-1-1 du Code du tourisme modifié par l’article 51 de la loi pour une République numérique).
Suivant la jurisprudence constante, on retiendra que les revenus de sous-location perçus illégalement sont qualifiés de fruits civils de la propriété. Ainsi, les loyers tirés de la sous-location appartiennent au propriétaire.
PROMULGATION DE LA LOI SUR L’ENREGISTREMENT DES MEUBLÉS DE TOURISME
Après avis du Conseil constitutionnel, la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, également Loi Élan a été promulguée au Journal officiel et est donc applicable, hormis pour certains points qui nécessitent la publication d’ordonnances.
Attendue depuis près de deux ans par les professionnels du secteur des industries hôtelières et les municipalités, cette loi renforce le contrôle effectif des locations touristiques par les autorités, le dispositif administratif mis en place par les maires et les sanctions pour contraindre les plateformes de location de courte durée et les loueurs ne respectant pas leurs obligations.
Une définition des meublés de tourisme
L’article L. 324-1-1 modifié du Code du tourisme donne une nouvelle définition légale des meublés de tourisme. Ce nouveau texte précise que les meublés de tourisme sont des villas, appartements ou studios meublés, à l’usage exclusif du
locataire, offerts à la location à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile et qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois.
Les meublés de tourisme se distinguent des autres types d’hébergement, notamment l’hôtel et la résidence de tourisme, en ce qu’ils sont réservés à l’usage exclusif du locataire, ne comportant ni accueil ou hall de réception ni services et équipements communs. Ils se distinguent de la chambre d’hôtes où l’habitant est présent pendant la location.
• Précisons que la location saisonnière ou touristique se distingue du bail d’habitation selon 2 critères : Le locataire n’y élit pas domicile, il y réside principalement pour les vacances.La location saisonnière doit être conclue pour une durée maximale de 90 jours à la même personne.
Les pouvoirs des communes renforcés
Le texte prévoit que dans les communes ayant mis en œuvre la procédure d’enregistrement de la déclaration préalable, toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme qui est déclaré comme sa résidence principale ne peut le faire au-delà de 120 jours au cours d’une même année civile, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure.
La commune peut, jusqu’au 31 décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué. Le loueur transmet ces informations dans un délai d’un mois, en rappelant l’adresse du meublé et son numéro de déclaration.
Les sanctions prévues
Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations prévues par le Code du tourisme est passible d’une amende civile dont le montant ne peut excéder 12 500 € par meublé de tourisme objet du manquement.
Les amendes encourues en cas de violation de la loi sur l’enregistrement des meublés de tourisme et/ou sur le respect de la limite de 120 jours de location sont fixées par l’article 145 de ladite loi :
» Pour le loueur : défaut d’enregistrement → amende civile d’un montant maximum de 5 000 €.
» Pour le loueur en résidence principale : non-transmission du nombre de jours ou dépassement du nombre maximum de jours de location → amende civile d’un montant maximum de 10 000 €.
» Pour la plateforme : non-information des loueurs de leurs obligations légales en matière de déclaration ou d’autorisation préalable et non-publication du numéro d’enregistrement sur l’annonce → amende civile d’un montant maximum de 12 500 €.
» Pour la plateforme : non-communication à la mairie du décompte du nombre de jours de location par son intermédiaire ou dépassement du seuil de 120 jours par son intermédiaire → amende civile d’un montant maximum de 50 000 €.
Pour rappel, la législation en vigueur impose déjà aux plateformes de mise en location de meublés de tourisme et aux loueurs de :
» Publier le numéro d’enregistrement de l’hébergement sur l’annonce dans les villes ayant mis en place cette procédure (Paris, Nice, Lyon, Bordeaux, Tours, Strasbourg, Toulouse, Annecy, Aix-en Provence, Cannes, Biarritz…).
» Respecter la durée maximale annuelle de location pour les résidences principales (120 jours/an).
» Bloquer les offres (pour les résidences principales) louées plus de 120 jours/an.
Par Patrick Gérolami, consultant